En décembre 2014, Quentin Ndeba fait son grand retour au Congo, diplôme en poche. Formé en Afrique du Sud, il revient avec un Bachelor en audit financier obtenu à l’Université UNISA. Mais ce n’est pas tout : il rentre également avec un emploi garanti, décroché depuis l’étranger. Le jeune homme originaire de Ouenzé intègre ainsi le cabinet Ernst & Young à Brazzaville en tant qu’auditeur financier. Une nouvelle ère commence pour lui.

Une carrière prometteuse… puis la rupture
Après cinq années d’expérience chez Ernst & Young, Quentin choisit de démissionner. Pour lui, cette expérience a été une école de rigueur, un tremplin pour mieux se positionner dans sa carrière. Il rejoint ensuite l’ONG américaine Catholic Relief Services en tant que Risk and Compliance Manager. Mais deux ans plus tard, coup dur : son contrat n’est pas renouvelé.
« En septembre 2022, j’ai reçu une notification de fin de contrat. C’était le début d’une période très sombre », confie-t-il.
Marié et père de deux enfants, Quentin vit cette phase de chômage comme un échec cuisant. Il se sent freiné dans son élan, comme si sa progression s’était inversée. Heureusement, le soutien indéfectible de son épouse lui permet de tenir le cap. Mais une autre difficulté se présente : il refuse catégoriquement de postuler à nouveau.
« Je n’étais plus prêt à revivre ce que j’avais vécu. Il fallait que je devienne mon propre patron. »
Le grand saut vers l’inattendu
Décidé à entreprendre, Quentin se lance… là où personne ne l’attend : la menuiserie numérique. Un virage inattendu, qui surprend son entourage. Ses parents tentent de l’en dissuader :
« Pense aux sacrifices que nous avons faits pour toi ! On ne t’a pas envoyé étudier en Afrique du Sud pour finir menuisier ! »
Mais Quentin reste ferme. Ce nouveau domaine l’inspire. Il observe un manque de créativité et une sous-valorisation du métier au Congo. Il se forme, puis fonde Congo Mbok’elengui, la première structure spécialisée en menuiserie numérique à Brazzaville.
Son entreprise adopte une approche écoresponsable : elle utilise du bois recyclé, récupéré auprès des sociétés forestières de Ouesso. Ces résidus, transformés à Brazzaville, deviennent des pièces uniques : signalétiques personnalisées, tableaux, gadgets, trophées, panneaux décoratifs, etc. Le tout conçu à partir d’essences nobles comme le Bilinga, l’Ewengué ou l’Ayous.
Les débuts difficiles
Pendant deux ans, Quentin travaille sans relâche pour faire connaître sa marque. Il affine son business model en intégrant des offres liées aux événements festifs (cadeaux de mariage, anniversaires, etc.). Il lance une vaste campagne de prospection : plus de 200 mails envoyés, une seule réponse… celle du Programme Alimentaire Mondial (PAM), qui devient son premier grand client.
Mais malgré ce succès, les revenus ne suffisent pas encore. Entre les charges fixes et les investissements pour moderniser son atelier, les fins de mois restent compliquées. Il accepte donc un poste dans une société pétrolière. Six mois plus tard, il démissionne à nouveau.
« C’était une perte de temps. Mon entreprise avait besoin de moi à 100 %. »
Une reconnaissance méritée
Aujourd’hui, Congo Mbok’elengui séduit de plus en plus. Ministères, institutions financières, ONG… les clients affluent, séduits par l’originalité et la qualité des services. Sa famille, autrefois sceptique, devient son premier soutien. Autour de Quentin, une équipe jeune, créative et passionnée œuvre à bâtir un avenir solide.
Son parcours inspire. Il prouve qu’une reconversion audacieuse peut devenir une réussite éclatante, si elle est portée par la passion, la vision et la résilience.
« Il suffit d’observer le marché, de se former sérieusement et de croire en sa capacité à créer de la valeur. » Quentin Ndeba.
Mildred Moukenga, La vitrine


